Image d'une femme en forêt pour la une de cet article portant sur les bienfaits de la nature.

De la marche en forêt à la visualisation de scènes naturelles: les bienfaits de la nature sur notre bien-être

Nadine Bachand Inspiration, Printemps 2021

Temps de lecture: 10 minutes

Portrait de Nadine Bachand, auteure de cet article sur les bienfaits de la nature.
Œuvrant chez Équiterre depuis 2003, Nadine est une écologiste passionnée qui a la capacité de tisser des ponts entre écologie et pleine conscience bienveillante.
Photo: NathB photographe

Nous savons intuitivement que le contact avec la nature est bénéfique pour notre équilibre. Un nombre croissant de recherches scientifiques en ont d’ailleurs démontré les bienfaits pour notre santé physique et psychique au cours des dernières années. Des effets mesurables subsistent même plusieurs jours après une sortie en plein air.

Mais pouvons-nous bénéficier de ces avantages en nous unissant à la nature par des images ou même en nous connectant à elle intérieurement? Une question fort pertinente alors qu’une part croissante de la population vit en milieu urbain et, qui plus est, se retrouve confinée chez soi dans une période de pandémie comme celle que nous vivons. Cet article vous propose un tour d’horizon de cette question fascinante.

Le contact avec la nature nous ressource

Au cours des sept millions d’années de notre évolution, nous avons passé la quasi-totalité de notre temps dans des environnements naturels auxquels nous nous sommes parfaitement adaptés (Miyazaki, Y. 2018). Ce n’est que durant les deux cents dernières années que nous avons commencé à vivre en milieu urbain, un laps de temps trop court pour que notre génétique ait pu s’y adapter. Nous vivons donc dans une société moderne avec un corps acclimaté à un environnement naturel. Alors que le nombre d’humains vivant dans les villes et les zones urbaines augmente chaque année, notre corps continue de reconnaître la nature comme étant son environnement naturel (Ibid.).

Forêt des Landes, France.
Photo: Florence Bourg

Il est reconnu depuis longtemps que les humains ont un besoin biologique de se connecter avec la nature, une affinité connue sous le terme de biophilie (Hansen M. et al., 2017). Il y a une vingtaine d’années, le biologiste américain E. O. Wilson a mis en lumière que les humains sont «câblés» pour se connecter avec le monde naturel, et qu’être dans la nature avait un effet profondément positif sur la santé humaine (Evans, K., 2018).

Le Dr Qing Li, médecin immunologiste au département d’hygiène et de santé publique à l’université de médecine de Tokyo, a réalisé plusieurs recherches sur les liens entre les forêts et la santé. Depuis 2003, la recherche a mis en lumière que les bains de forêt peuvent renforcer le système immunitaire, diminuer l’anxiété, la dépression, l’insomnie et la colère, donner de l’énergie, réduire la pression artérielle et le stress et favoriser la détente (Ibid, et Lévy, O., 2018). Les promenades en forêt amélioreraient notamment aussi la concentration et la mémoire, les fonctions cardiovasculaires et le métabolisme, et réduiraient la glycémie (taux de sucre dans le sang) (Lévy, O, 2018).

Le pouvoir bénéfique des forêts

Afin d’évaluer plus précisément l’incidence d’une promenade en forêt, des chercheurs ont mesuré les effets sur le bien-être de participants avant et après une marche dans les bois, comparativement à une marche en milieu urbain. Alors que d’autres études ont montré que marcher à l’extérieur, peu importe l’endroit, réduit la dépression, l’anxiété et la colère, ces chercheurs ont constaté que l’expérience de marcher en forêt offrirait une plus-value: celle d’améliorer la vigueur et de réduire la fatigue (Takamaya, N., 2014). Le secret des forêts résiderait dans la proportion plus élevée d’oxygène qu’on y retrouve comparativement au milieu urbain, et dans la présence de phytoncides, des huiles naturelles faisant partie du système de défense des arbres. Ceux-ci diminueraient la production d’hormones de stress chez les humains, comme le cortisol et l’adrénaline.

Les bienfaits des espaces verts, parcs et jardins

Réserve nationale du Cap-Tourmente au Québec.
Photo: Florence Bourg

Si vous ne vivez pas à proximité d’une forêt, il est possible de vous ressourcer en allant vous promener dans un parc ou autre espace vert paisible. En effet, selon une revue systématique publiée par des chercheurs de l’Université d’East Anglia en 2018, l’exposition aux espaces verts (terrains ouverts et non aménagés avec une végétation naturelle ainsi que les espaces verts urbains, comprenant les parcs urbains et la verdure des rues) réduit le risque de diabète de type II, de maladies cardiovasculaires, de décès prématuré, d’accouchement prématuré, de stress et d’hypertension artérielle (Twohig-Bennett, C. et Jones A., 2018). Selon cette même étude, qui a regroupé des données mondiales impliquant plus de 290 millions de personnes, les populations qui sont plus exposées aux espaces verts sont également plus susceptibles de se dire en bonne santé globalement (Science Daily, 2018).

Qui plus est, les experts comme Dr Qing Li suggèrent de s’entourer de plantes et de fleurs à la maison et au bureau, car celles-ci permettent de nous calmer et de ressentir une plus grande satisfaction face à la vie (Hall, C. et Knuth, M. 2019; et Bermejo, G. et Sparke, K. 2019), en plus de purifier de manière naturelle l’air que nous respirons (Lee, S, 2017).

Photo: Vital Sinkevich

Regarder et imaginer des scènes de nature: efficace?

Comparer l’effet de l’exposition à certaines images

Une revue systématique publiée en 2019 a montré que l’exposition à des images de nature telles que des photos, des images 3D et des vidéos de la nature, induisait un état de relaxation (Jo, H., Song, C., et Miyazaki, Y. 2019). Les résultats d’une autre étude ayant comparé l’effet d’images de nature et celui d’images de scènes urbaines sur les réactions au stress suggèrent que l’exposition à des images d’espaces verts serait plus efficace pour récupérer après un événement stressant (van den Berg, M. M., 2015). Cette étude ajoute aux fondements de l’hypothèse de la biophilie: l’exposition à la nature, indépendamment de la façon dont elle est rencontrée, peut être bénéfique pour la santé et le bien-être humains (Grinde, B., et Patil, G. G., 2009).

Quel est l’effet des stimuli audio-visuels?

Une autre étude a examiné l’effet relaxant des stimuli audio-visuels apportés par une courte vidéo montrant des environnements forestiers comparativement à une vidéo montrant des contextes urbains pendant la quarantaine du COVID-19 (Zabini et al., 2020). Les résultats ont montré une diminution à court terme du niveau d’anxiété après exposition à une vidéo montrant des environnements forestiers. Aucun changement à long terme n’a toutefois été observé. L’exposition virtuelle aux environnements forestiers s’est donc avérée efficace pour réduire les niveaux de stress humain chez les personnes confinées, en condition de privation environnementale et d’absence de contact direct avec la nature.

L’impact de l’imagerie guidée basée sur la nature

Et qu’en est-il de la visualisation? Une étude s’est intéressée à comparer l’impact de la visualisation guidée – ou imagerie guidée – et de l’imagerie guidée basée sur la nature pour réduire l’anxiété (Nguyen, J., et Brymer, E., 2018). D’une part, il est connu que passer du temps dans la nature a des effets calmant l’anxiété. Et d’autre part, l’imagerie guidée s’est également avérée efficace pour réduire les symptômes d’anxiété. Dans l’imagerie guidée, un accompagnement externe permet au sujet de générer intérieurement des images qui invoquent des expériences perceptives, impliquant le sens de la vue, de l’audition et du toucher par exemple. Cette étude a montré que l’imagerie guidée basée sur la nature était plus efficace que l’imagerie guidée non basée sur la nature pour la gestion de l’anxiété. Selon ses auteurs, cette découverte ajoute aux preuves croissantes qu’une plus grande relation humain-nature est importante pour l’équilibre intérieur et le bien-être.

Exercice pratique: une marche en forêt imaginaire

Maintenant que nous nous sommes familiarisés avec ce sujet passionnant, transportons-nous, en imaginaire, dans une forêt et faisons l’expérience pratique des effets de la visualisation.

Forêt au printemps, Beaupré, Québec.
Photo: Florence Bourg
  • Pour cet exercice, assurez-vous d’être confortablement assis.se, le dos droit, les yeux fermés ou mi-clos.
  • Prenez une profonde inspiration, puis laissez votre corps se déposer entièrement en expirant complètement.
  • Observez quelques instants les différentes sensations dans votre corps, sans juger, sans analyser. Prenez quelques profondes respirations en observant avec douceur.
  • Puis, visualisez que vous marchez en forêt. Vous marchez très doucement.
  • Un pas après l’autre, vous observez le paysage autour de vous. Tout en respirant, vous contemplez les arbres, les multiples teintes verdoyantes des végétaux. Vous vous laissez imprégner par la beauté de la forêt qui vous entoure.
  • Vous sentez les odeurs typiques de la forêt, le bois, les aiguilles de conifères, peut-être le parfum de certaines fleurs. Vous vous laissez envelopper par ces odeurs somptueuses.
  • Vous captez les sons de la forêt: les chants des oiseaux, le son des brindilles qui craquent sous vos pas, le bruit d’un ruisseau qui coule doucement.
  • Vous laissez cette expérience pénétrer en vous, profondément. Vous êtes pleinement présent.e dans l’expérience.
  • Vous vous immobilisez et vous prenez une grande respiration. Prenez conscience que l’oxygène contenu dans l’air que vous venez d’inspirer existe grâce aux arbres et aux autres végétaux qui transforment le gaz carbonique en oxygène.
  • L’air qui remplit vos poumons vient oxygéner votre sang qui est, en grande partie, constitué d’eau. Cette eau qui a été flocon de neige, océan, fleuve, rivière.
  • Vous continuez de respirer doucement et profondément. Le temps est suspendu. Il n’y a rien d’autre que vous, la forêt et ce moment présent.
  • Observez les sensations dans votre corps, et notez, sans analyser, tout changement, s’il y en a, par rapport à il y a quelques instants avant de débuter cet exercice.
    • Observez ce qui s’est installé dans l’espace intérieur du corps. Votre corps est-il plus détendu? Vous sentez-vous plus enraciné.e, déposé.e? Sans jugement et sans rechercher quoi que ce soit de particulier, observez.
    • Observez votre respiration: sa profondeur, son amplitude, son rythme. S’est-elle modifiée quelque peu au cours des dernières minutes?
    • Votre esprit est-il plus déposé, plus clair?
    • Vous sentez-vous globalement plus calme, plus en paix? Plus connecté.e au monde et à la vie? Plus présent.e?
    • Remarquez toute modification de votre état intérieur, dans votre propre écosystème. Y a-t-il une sensation d’unité, une sensation d’être intimement relié à la Terre, à la nature?
  • Prenez une grande inspiration et revenez en bougeant doucement les doigts, les orteils et en ouvrant les yeux. Connectez plusieurs fois dans la journée avec cet état.

Au-delà de tout, la nature est Présence

Premières fleurs forestières, Beaupré, Québec: la trille rouge.
Photo: Florence Bourg
Fleur sauvage, Équateur.
Photo: Florence Bourg

Pour ma part, je crois également que ce qui crée ce sentiment de bien-être lorsque nous sommes dans la nature est la sensation d’unité, de faire un, d’être relié avec la vie qui émane naturellement en soi. La nature vient éveiller, ou plutôt nous mettre en connexion, avec cette partie de soi qui sait intrinsèquement que nous faisons partie d’un tout plus grand que soi. Et la sensation de liberté qui accompagne le fait d’être au présent, ici et maintenant, plutôt que d’être ballotés intérieurement par des ruminations sur le passé ou des projections dans le futur.

La nature est, elle existe simplement et se trouve dans l’éternel moment présent. Lorsque nous nous y branchons, nous syntonisons cette fréquence où nous sommes dans l’être, plutôt que le faire, ce faire où nous avons constamment l’impression de devoir faire quelque chose pour être bien, ce faire où nous nous disons «un jour, lorsque j’aurai obtenu ceci ou cela, lorsque ceci ou cela se produira, je serai bien, heureux et serein». Cet état où nous sommes tournés vers l’extérieur, où nous nous projetons dans le futur pour trouver une certaine forme de satisfaction crée de la souffrance car il perpétue notre refus du présent. Alors que la nature est, instantanément, simplement. Elle est éternellement ici et maintenant, elle est Présence.

Nous faisons partie de la nature; en fait, nous sommes elle et elle est nous. Nous la transportons donc pour ainsi dire en permanence, en tout temps et partout où nous allons. Nous pouvons à chaque instant nous connecter à notre parcelle d’éternité à l’intérieur de nous, et nous sentir dans l’éternel moment présent. Plonger en soi, se connecter avec son cœur, en se visualisant dans la nature, relié.e à plus grand que soi en soi, est un outil puissant pour conserver ou raviver ce sentiment d’être en lien, en unité avec la vie et d’être ici et maintenant, dans le présent.

Cultiver l’émerveillement et la gratitude devant la beauté de la nature et de la vie au quotidien sont d’excellentes portes d’entrée pour apporter une profonde paix intérieure. Je vous invite à vibrer le plus souvent possible avec la nature qu’elle soit intérieure ou extérieure, car celles-ci ne sont pas dissociées.

Bonne connexion!

Nadine Bachand

Écologiste, thérapeute, conférencière, professeur de yoga et de méditation. Auteure de Méditer – La terre vue de l’intérieur. Pour vous procurer son livre ou pour d’autres informations sur ses services: nadinebachand.com

Ses prochaines activités:

  • Méditations virtuelles hebdomadaires de 30 minutes les mardis 17h30
  • Programme de groupe Méditer – La terre vue de l’intérieur, du 30 mars au 12 mai 2021
  • Retraite de ressourcement du 7 au 9 mai 2021

Vous aimeriez aussi

Cet article vous a plu? Vous pouvez contribuer librement à la mission de Zenflo.

Pourquoi contribuer?

Sources

Bermejo, G. et Sparke, K. 2019. Happier in a home with plants? A study on the relationship between human wellbeing and ornamental plants in private households. Acta Hortic. 1258, 47-54.

Evans, K. 2018. Why Forest Bathing Is Good for Your Health. Greater Good Magazine.

Grinde, B., et Patil, G. G., 2009. Biophilia: does visual contact with nature impact on health and well-being? International journal of environmental research and public health, 6(9), 2332–2343.

Hall, C., et Knuth, M. 2019. An Update of the Literature Supporting the Well-Being Benefits of Plants: A Review of the Emotional and Mental Health Benefits of Plants. Journal of Environmental Horticulture (2019) 37 (1): 30–38.

Hansen MM, Jones R, Tocchini K. Shinrin-yoku (forest bathing) and nature therapy: A state-of-the-art review. Int J Environ Res Public Health. 2017;14 10.3390/ijerph14080851

Jo, H., Song, C., & Miyazaki, Y. 2019. Physiological Benefits of Viewing Nature: A Systematic Review of Indoor Experiments. International journal of environmental research and public health16(23), 4739.

Lee, S. 2017. Why Indoor Plants Make You Feel Better. NBC News.

Lévy, O. 2018. La Forêt contre le stress. La Presse.

Miyazaki, Y. 2018. Shinrin yoku: les bains de forêt, le secret de santé naturelle des Japonais. Éditions ADA, 192 p.

Nguyen, J., et Brymer, E., 2018. Nature-Based Guided Imagery as an Intervention for State Anxiety. Frontiers in psychology9, 1858.

ScienceDaily. University of East Anglia. (2018, July 6). It’s official — spending time outside is good for you.

Takayama N, Korpela K, Lee J, Morikawa T, Tsunetsugu Y, Park B-J, Li Q, Tyrväinen L, Miyazaki Y, Kagawa T. Emotional, Restorative and Vitalizing Effects of Forest and Urban Environments at Four Sites in Japan. International Journal of Environmental Research and Public Health. 2014; 11(7):7207-7230.

Twohig-Bennett, C., et Jones A. The health benefits of the great outdoors: A systematic review and meta-analysis of greenspace exposure and health outcomes. Environ Res. 2018 Oct;166:628-637.

Van den Berg, M. M., Maas, J., Muller, R., Braun, A., Kaandorp, W., van Lien, R., van Poppel, M. N., van Mechelen, W., & van den Berg, A. E., 2015. Autonomic Nervous System Responses to Viewing Green and Built Settings: Differentiating Between Sympathetic and Parasympathetic Activity. International journal of environmental research and public health12(12), 15860–15874.

Zabini F, Albanese L, Becheri FR, Gavazzi G, Giganti F, Giovanelli F, Gronchi G, Guazzini A, Laurino M, Li Q, Marzi T, Mastorci F, Meneguzzo F, Righi S, Viggiano MP. Comparative Study of the Restorative Effects of Forest and Urban Videos during COVID-19 Lockdown: Intrinsic and Benchmark Values. International Journal of Environmental Research and Public Health. 2020; 17(21):8011.